OUT OF DREAM
Je
suis épuisé. Je n’en peux plus de me battre. Je crois que je vais lâcher.
Comment expliquer…
Je
n’ai jamais été doué pour les romances. Je n’ai jamais été doué pour la
rigueur. Tout me lasse, je hais la promiscuité, le contact avec les autres. Peu
de preuves d’amour. Peu d’amour tout court. Mais j’y croyais, comme on y croit
tous. Les films, les chansons, les amours sont compliqués mais finissent
toujours bien. Mais passé un temps, on est forcément déçu. Si on a été aimé
petit, on y croit plus longtemps, parfois jusqu’au succès. Mais pas moi. Moi
j’ai un fusil dans la main. Moi j’ai cette brûlure sur le bras et cette flamme
dans mes yeux. On n’a encore jamais vu un assassin plaider la solitude à son
procès. On ne peut pas construire. Alors on détruit. On détruit pour de
l’argent. Puisqu’on ne peut m’aimer si je ne m’aime moi-même, alors je vais
m’acheter une image. Les costumes, les chaussures en cuir, les vestes en
velours descendant jusqu’aux pieds allongeant la silhouette. L’image du dandy.
Le tueur triste, plein d’amertume. Buvant son whisky avant d’égorger vif, tout
en prenant soin de ne pas salir sa belle chemise neuve. Pute de luxe qu’on ne
paye qu’en cadeau et qui ont un respect usurpé.
Réflexion
de comptoir. J’ai trop bu, mais je dois faire mon job. Le sang. Ce liquide en
écoeure plus d’un. Les médecins n’y font plus attention. Moi je l’aime. Je suis
comme un vampire. J’ai le goût du sang. J’admire sa texture, son odeur, sa
disposition quand il gicle de la gorge de mes futurs cadavres. Cela me met en
état de trans. Je vis, revis. Un jour j’ai essayé la religion. Ils m’ont parlé
d’ouvrir mon cœur. Cela ne m’a rien apporté. Alors, prenant sur moi, j’ai
ouvert le cœur des autres. Et oui, c’est un pur plaisir. J’aime le sang, j’aime
la chair qui se déchire, j’aime les ligaments qui rompent, j’aime l’os qui
craque. J’aime voir cette chose auquel on accorde toute notre importance, la
vie, tenter de s’accrocher, puis désespérément s’éteindre.
Lorsqu’une
bougie s’éteint, elle ne produit plus de chaleur. Un corps, c’est la même
chose. J’aime attendre et sentir le corps si chaud devenir glacial. Cela efface
mes dernières peur, mes derniers doutes. Un mort est froid. Bien plus que moi.
Le whisky me réchauffe. Peut-être est ce pour ceci que je l’aime tant. J’aime
aussi la musique. La douce voix de la chanteuse de Shivaree apporte toujours une touche d’émotion à mes meurtres.
Tueurs
à gage. Je n’en peu plus. Je veux m’aimer. Je veux mourir. Je veux…
Je
suis si lâche. Je ne peux plus m’arrêter. Des gens comptent sur moi. Des gens
haut placés. Mes dernières scrupules, tenir un contrat…
Un
dernier whisky, puis j’y vais. Apporter moi l’addition. Evidement que je vais
vous tuer, vous ne pensez pas que je peux vous laisser dans mon secret, même si
vous n’êtes qu’un pauvre serveur. Vous ne me croyez pas ? Je vais vous
montrez qui je suis. Personne n’a cru en moi, mais je suis quelqu’un, et je
peux vous détruire. Je peux vous détruire. Je peux me détruire…
Un
autre whisky, sans glace, et promis, je rentre chez moi…